L’HOMMAGE DES DUCS DE BRETAGNE AU ROI DE FRANCE … OU : JE T’AIME, MOI NON PLUS .

L’HOMMAGE DES DUCS DE BRETAGNE au ROI DE FRANCE. Ou : « Je t’aime, MOI NON PLUS ».

Publié le 22 novembre 2014 par Louis M

Je rappelle ici ces phrases péremptoires du duc souverain Jean IV, destinée à son voisin Charles V, que j’ai publiée ailleurs, maintes fois, et que j’ai traduite en français moderne pour la rendre compréhensible :

« Qu’il plaise, à vous, roi de France, et à votre Conseil, de savoir ceci : …. Le Pays de Bretagne est un Pays distinct et séparé des autres, sans qu’il y ait rien dans ce pays qui ne relève du sort de son gouvernement, qui est universel. Anciennement, ce Pays était un royaume, et était gouverné par des Rois, ainsi Judicaël, Salomon, Conan … qui ont gouverné en gouvernement royal….. Il apparaît clairement qu’il a été et qu’il est encore royalement tenu. Le Duc de Bretagne est en possession des droits royaux, sans que nul autre que lui, en sa Principauté de Bretagne, y ait rien à voir. Ni vous, ni aucun de vos prédécesseurs Rois de France n’ont jamais été reconnus, ni par moi, ni par aucun de mes prédécesseurs, comme Souverain. »

Jean IV, duc de Bretagne, au roi de France Charles V, mai 1384.

Traduisez, en langage moderne : « Monsieur le roi de France : allez VOUS LA FAIRE METTRE ».

Réveillez-vous, messieurs les hystoryens : cette lettre a été écrite au XIV ème siècle !

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Nous allons effondrer ici, sans aucun déplaisir d’ailleurs, un nouveau mythe, une inexactitude grave qui traine encore dans de nombreux livres d’histoire écrits par des bretons, des plus titrés, et qui ont empoisonné le problème important de savoir si la Bretagne des Ducs, dans la mesure où ceux-ci ont prêté aux rois de France plusieurs siècles durant, ce qu’on dénomme l’hommage, n’étaient pas par là-même des subordonnés du roi de France, c’est à dire admettaient que la Bretagne faisait partie du royaume de France. Mes conclusions – est-il besoin de dire qu’elles sont honnêtes, strictement -, vont certainement soulager tous ceux qui réclament l’application rigoureuse du droit à la Bretagne : sa réapparition sur la scène internationale, comme Etat à part entière. Le passé commande le présent et l’avenir. Il n’y a pas de nation sans une longue histoire; la connaissance de cette histoire est indispensable pour que la nation, quasi assassinée comme l’a été la nation bretonne, renaisse.

Le problème de l’hommage des ducs souverains de Bretagne au roi de France, son voisin et ennemi héréditaire, est toujours mal compris en Bretagne. La raison en est que les historiens qui se sont hasardés à écrire sur ce sujet très complexe, instrumentalisé par certains en faveur de leurs thèses jacobines – ou de leur haine de la Bretagne, variété de la honte de soi -, relève du droit, davantage que  de l’histoire. Pour le comprendre bien, il faut posséder des compétences très poussées en histoire des institutions et en droit médiéval – disciplines qui relèvent du droit, comme le droit constitutionnel -, et qui s’enseignent dans les facultés de droit, non dans les facultés des lettres.

Certains « hystoriens » bretons soutiennent encore que, du moment que le Duc de Bretagne prête hommage au roi de France, plusieurs siècles consécutifs, c’est qu’il reconnait, par la-même, qu’il « tient » son Duché dudit roi, et que … la Bretagne fait partie de la France ! Cette proposition procède d’une ignorance abyssale du sujet. Beaucoup de ces historiens, en enseignant une doctrine fausse, ont paralysé les esprits des jeunes étudiants, dont la vocation naturelle était d’affranchir le pays de ces fables. Reconnaissons que le sujet est difficile et que, sans être juriste, il n’est pas possible d’y voir clair.

 

Qu’est-ce que l’hommage ? Chaque fois qu’un nouveau Duc monte sur le trône de Bretagne, et chaque fois qu’un nouveau roi de France accède au trône de France, le Duc sort de son Duché, et se transporte en grand apparat à la cour de France, pour prêter au roi ce qu’on dénomme l’hommage. Cela étant fait, il rentre chez lui.

Hommage lige et hommage simple. Au moyen âge, il est fréquent que les seigneurs bénéficient de la jouissance de plusieurs seigneuries, appartenant à des royaumes ou à des principautés différents, et relevant, dès lors, de l’autorité souveraine de plusieurs princes. Par exemple, les Ducs de Bretagne, souverains chez eux pour le Duché de Bretagne,jouissent également, par la concession qui leur a été faite par leurs voisins les rois de France et d’Angleterre, de seigneuries situées dans le royaume de France (Montfort l’Amaury, Etampes ….) et dans le royaume d’ Angleterre (comté de Richmond). Les rois de France jouissent, à certaines époques, de seigneuries en Italie (Asti, Milan …). Certains souverains exigent de ceux à qui ils ont concédé une seigneurie, un lien plus « fort » que celui qu’on leur demande habituellement, dans les cas ordinaires. Par exemple parce que le territoire concédé est le premier dont le bénéficiaire a obtenu la jouissance, parmi ceux qui lui ont été concédés en « bénéfice », ou qu’il est particulièrement important ou riche (un comté, un duché …). Dans ce cas, l’hommage est dit « lige » (homagium ligium). L’hommage lige se prête selon une procédure plus complexe, et comporte pour celui qui le prête des obligations plus lourdes que pour les hommages ordinaires, dont il sera parlé ci-après. Il signifie, principalement, que si deux rois ou princes ont concédé, chacun de leur côté, une ou plusieurs seigneuries à la même personne, et si ces rois ou princes entrent en guerre, celui qui a prêté l’hommage lige doit se ranger aux côtés du seigneur lige, non de celui auquel il a prêté un hommage simple : l’hommage lige est, peut-on dire, un hommage « prioritaire », en faveur d’un seigneur déterminé : l’homme lige doit combattre en faveur de celui qui lui a concédé une seigneurie de cette nature contre « tout homme qui doit vivre ou mourir », c’est à dire contre tous les ennemis de son seigneur lige, même si certains de ces ennemis sont ses propres amis, ses parents, ou ses alliés.

Dans les autres cas, l’hommage est dit « simple » ou « plain » (en latin : homagium planum). Il se prête selon une procédure plus simple, et engendre pour celui qui le prête, des obligations plus légères que l’hommage lige, ce que nous allons développer ci-après.

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Les hommages prêtés par les Ducs de Bretagne aux rois de France.

Le Duc de Bretagne, lorsqu’il monte sur le trône breton, conformément aux usages établis de longue date, prête au roi de France – et au roi d’Angleterre, s’il y a lieu -, non pas un, mais deux hommages. Pour simplifier cette matière complexe, les choses se déroulent de la manière suivante :

 

I – L’HOMMAGE POUR LES SEIGNEURIES APPARTENANT AUX ROIS DE FRANCE : L’HOMMAGE LIGE, POUR LES FIEFS CONCEDES PAR LE ROI DE FRANCE AU DUC DE BRETAGNE, A TITRE VIAGER.

 Certaines seigneuries, situées en France, appartenant au roi de FRANCE, sont simplement « concédées » au Duc de Bretagne, à titre viager, pour qu’il en jouisse, sans en devenir lui même le propriétaire. Ces seigneuries portent en droit féodal le nom de « bénéfices », ou encore de « fiefs ». Ce ne sont pas toujours les mêmes selon les époques. Habituellement il s’agit des comtés de Montfort l’Amaury, d’Etampes, de Vertus, et de la baronnie de Neauphle-le-chateau ….

Pour ces seigneuries, le Duc de Bretagne prête un hommage lige, ce qui est assez naturel, puisqu’il n’en est pas le propriétaire. 

Accompagné d’une suite fastueuse – il est l’un des principaux souverains de la Chrétienté -, il se rend en France, non sans discussions et négociations préalables « serrées »entre le gouvernement breton et le gouvernement français, et va à la rencontre du roi, dans un lieu déterminé d’un commun accord.

Devant les deux gouvernements – breton et français -, et des témoins très nombreux, le Duc enlève son bonnet, son ceinturon et son épée, s’agenouille devant le roi, place ses mains dans celles du roi, et prononce les formules sacramentelles ; à peu de choses près : «  Je vous demande de me reconnaître comme votre homme ». Le roi prononce des paroles symétriques : « j’agrée votre demande, et vous accepte pour mon homme » …. Les deux hommes s’embrassent … sur la bouche (c’est l’usage du temps, non un acte homosexuel !)

 Un compte rendu écrit est rédigé par les notaires, en présence des chanceliers de Bretagne et de France. Pour ces seigneuries – et seulement pour celles-là -, le Duc n’étant pas le propriétaire des seigneuries concédées par le roi, les deux parties, égales en droit, sont inégales en fait, puisque le Duc n’est que le bénéficiaire du fief, et que le roi  y exerce les droits de souverainetéEn droit moderne, on pourrait dire, pour mieux faire comprendre ce qu’est cette affaire, que le roi possède la « nue propriété », et que le Duc possède l’  « usufruit »...

Si le bénéficiaire du fief ou bénéfice (le Duc) manque à ses obligations à l’égard du propriétaire de ce fief (le roi de France), le propriétaire reprend possession de la seigneurie qu’il a concédée, ce qui est normal. C’est ce qu’on appelle la « commise ».

Tout se passe, en quelque sorte, de la même manière qu’un immeuble que son propriétaire loue à un locataire, moyennant un loyer. Si le locataire cesse de payer le loyer, le contrat est rompu, et le propriétaire reprend possession de son bien.

 

Hommage à genoux

Illustration explicative : le seigneur, propriétaire du fief, est assis sur son siège. Le « vassal », auquel est concédée la jouissance du fief, a ôté son bonnet, son ceinturon, son épée, et s’agenouille devant le seigneur, et place ses mains dans celle du seigneur. A l’arrière plan, un scribe consigne par écrit les termes de l’hommage.

 

II –  L’HOMMAGE RENDU PAR LE DUC DE BRETAGNE POUR LE DUCHE DE BRETAGNE : UN SIMPLE CONTRAT D’ALLIANCE, POUR « S’AIDER MUTUELLEMENT ».

 

La nature de l’hommage, et la manière dont il est prêté par les Ducs de Bretagne connaissent deux phases bien séparées, et dont la signification est aujourd’hui claire :

De Arthur III à Jean IV, pendant un siècle et demi, de 1202 à 1366, les Ducs, ne se sentant pas menacés par les Français, trop faibles pour les envahir, et préoccupés par les problèmes incessants de leur royaume, acceptent de prêter un hommage prioritaire au roi de France, c’est à dire un hommage lige. (Planiol, tome 3, pages 53 et suivantes). Ce qui n’implique, nous l’avons dit, qu’une alliance préférentielle en faveur du roi de France, au cas où celui-ci entrerait en guerre contre l’un de ses ennemis, en aucun cas un quelconque privilège en sa faveur en Bretagne. Planiol démontre, dans des pages très motivées, que le roi de France, n’exerce aucune autorité en Bretagne, et ce d’aucune sorte (tome III, pages 51 à 104), en dépit de ses nombreuses tentatives d’empiètement, toutes refoulées.

Mais à partir du milieu du 14ème siècle, la France, devenue une puissance redoutable, est un danger pour la souveraineté de la Bretagne, et ne cache rien de ses ambitions. Les Français, en effet, ayant envahi, confisqué ou annexé un certain nombre des principautés qui les entourent, prétendent asservir la Bretagne et les Bretons, et obliger ceux-ci à reconnaitre leur souveraineté, c’est à dire à se reconnaitre leurs sujets. Ce qu’ils refusent, absolument. Et catégoriquement : ils sont chez eux en Bretagne, ce pays est le leur, la France est un pays étranger.

Pour le Duché de Bretagne, les choses sont très différentes de la situation des comtés et seigneuries ci dessus. Les rois de France n’ont jamais été souverains en Bretagne, le Duché de Bretagne n’est en aucun cas une « concession » du roi de France, ni un bénéfice accordé par celui-ci, ni un fief. Pas davantage une « région » ou une « province » née de l’éclatement (un « démembrement », selon la terminologie du temps) de l’empire de Charlemagne et de ses successeurs, puisque la Bretagne n’a jamais été incluse dans cet empire. Les deux pays se sont constitués et développés côte à côte, par des processus similaires, sans que le roi de France ait la moindre autorité en Bretagne, sans que les Bretons aient jamais été ses « sujets », si ce n’est dans ses rêves ou dans ses prétentions. Le « souverain seigneur », le » prince  naturel » de Bretagne est le Duc. Le roi de France y est strictement étranger. Pas seulement cela : il est le souverain d’un pays ennemi, avec lequel, même durant les périodes « calmes » et d’alliance apparents, on est toujours en contentieux, même si l’on est contraint de coexister en paix, si faire se peut. La France et la Bretagne ne sont pas même des frères ennemis, mais des ennemis tout court, qui se vouent une haine implacable.

(Cette haine a duré jusqu’en 1789. Puis, il y a eu un « break » de 150 ans. Les Bretons ayant été mentalement écrasés, au nom de la « révolution de la Liberté », n’ont plus de droit que de se haïr eux-mêmes; la haine de la France est en train de resurgir, depuis que les Bretons ont redécouvert leur histoire de peuple martyr, et l’absolue volonté de la France de bafouer leurs droits millénaires à Nantes et dans son comté. Le phénomène est accru par la présence de collabos dans les instances françaises et bretonnes, qui sont maintenant démasqués et vomis).

Ici, l’hommage prêté au roi de France par le Duc de Bretagne n’est pas celui  pour lequel le roi concède une seigneurie à un tiers pour en jouir, comme pour les comtés de Montfort l’Amaury, d’ Etampes, etc., mais un contrat d’alliance entre deux seigneurs souverains dans leurs pays respectifs, égaux en droit et en dignité. Ce que soulignent tous les juristes.

La procédure est distincte, à la fois plus simple et plus complexe.

Le Duc ne fait pas un voyage distinct pour les deux hommages, bien entendu. Il se rend avec sa Cour et son gouvernement – dont le chancelier – là ou les deux gouvernements ont décidé que se déroulerait la cérémonie des hommages. La France est à ce point un pays étranger et ennemi, que le Duc doit demander des « sauf-conduits » pour voyager sur les terres de son compère le roi de France !

 Dans tous les cas, l’enjeu politique réel de l’hommage étant loin d’être anodin, d’autant que les Bretons connaissent parfaitement la mauvaise foi des Français, qui vont tenter de se servir de l’hommage pour essayer d’empiéter sur les prérogatives de l’Etat breton à leur avantage, des négociations sont engagées entre les chanceliers (premiers ministres) de Bretagne et de France, pour discuter le lieu, la date, les modalités de l’hommage, et son contenu, et pour empêcher tout « dérapage » de la part des Français.

C’est le Duc qui se déplace vers le roi, et se rend en France, parce que celui-ci, principal prince de la chrétienté, possède un rang honorifique supérieur au Duc.

 Des conciliabules, pas obligatoirement courtois précèdent, sur les lieux mêmes, au « domicile » du roi de France, la prestation de l’hommage. Invariablement, le chancelier de France prétend exiger du Duc l’hommage lige. Invariablement, le chancelier de Bretagne et le duc s’y opposent. Invariablement, devant le refus ferme et obstiné des Bretons, les Français cèdent : dans ce contexte d’hostilité féroce entre les royaumes de France et d’ l’Angleterre, toujours prêtes à entrer en guerre, les Français sont bien obligés de se contenter d’un hommage simple, l’alliance de la Bretagne, pays important, capable de mobiliser des armées importantes, est trop précieuse, même à ce prix.

Le Duc, au cours de la cérémonie, reste debout, n’enlève ni son bonnet, ni son ceinturon, ni son épée, et ne fléchit pas le genou. Il place ses mains dans celles du roi de France, les deux hommes s’embrassent sur la bouche, comme plus haut. Le Duc se reconnaît « l’homme » du roi, et inversement, le roi lui dit : « je t’accepte pour mon homme ».

Les chanceliers et des membres des deux gouvernements, ainsi que des témoins très nombreux, et des deux cours sont présentes dans cette cérémonie grandiose, qui attire toujours une foule considérable, compte tenu de la puissance des deux souverains, et de l’enjeu politique de la cérémonie.

Puis, les notaires, en présence des chanceliers rédigent un compte rendu écrit, qui sert de preuve, et de référence pour l’hommage suivant.

Tout ceci se déroule dans un climat de tension forte. Il faut bien insister sur ce point, sans lequel rien n’est compréhensible : ce ne sont pas des amis qui se prêtent à cette cérémonie, mais des ennemis. La menace d’une action armée de la France contre la Bretagne, en cas de refus de celle-ci d’entrer dans cette alliance obligée, est hyperprésente, le souci des conseillers du Duc est clairement de maintenir le Duché en paix. Mais l’inverse est vrai : la Bretagne est une alliée redoutée, qui fait peur : les Français sont tenus de ménager sa susceptibilité (34).

 OBLIGATIONS CREEES PAR LE CONTRAT D’ALLIANCE RESULTANT DE L’HOMMAGE.

Les obligations qui naissent de ces contrats d’alliance sont clairement définies par les juristes du temps : à ceci près qu’en acceptant de se déplacer lui-même à la cour du roi de France – et non l’inverse -, et que le Duc lui reconnaît une prééminence honorifique au roi de France, en sa qualité de prince le plus puissant de la chrétienté, ce contrat d’alliance, même si les deux pays sont d’importance très inégale, ne met juridiquement en aucun cas le Duc de Bretagne en situation d’infériorité : les deux souverains agissent, sur le terrain juridique, à égalité (25).

Il ne s’agit pas, ici, pour le roi de France de céder, même viagèrement au Duc de Bretagne quoi que ce soit, mais d’obtenir de lui, à charge de stricte réciprocité, son aide et son alliance ..

Les obligations créées par le contrat sont égales et symétriques pour les deux souverains. C’est ce qu’on appelle un contrat synallagmatique, c’est à dire bilatéral. C’est ce que n’ont jamais compris jusqu’à aujourd’hui, les historiens bretons, qui, n’étant pas juristes, ne savent ni ce qu’est un contrat, ni ce qu’est un contrat synallagmatique (1).

Les obligations des deux parties comportent trois éléments :

La fidélité, ou fidelitas. Elle s’analyse comme l’obligation de ne pas se nuire réciproquement. Cette obligation « négative » tombe sous le sens.

L’aide militaire, ou auxilium : si l’un des seigneurs entre en guerre contre un autre, son co-contractant est tenu de lui apporter son aide, et réciproquement; il s’agit, en quelque sorte, d’une alliance militaire réciproque. ..

L’aide par les conseils ou concilium. Les deux hommes doivent se conseiller réciproquement, par exemple en assistant aux réunions de leurs conseils s’ils y sont appelés, ou en consignant, par lettre ou par ambassadeurs, les recommandations qu’ils se doivent mutuellement.

Contrairement à ce qui a été souvent été écrit par les historiens bretons non juristes, ce contrat ne comporte évidemment ni la reconnaissance d’aucune sorte de sujétion de la Bretagne à l’égard de la France, en aucun cas – horreur impensable ! -, ni que la Bretagne fait partie du royaume de France : aucune ambiguité sur ces points, donc. 

Les engagements des deux souverains peuvent – en théorie -, être rompus si l’un d’eux manque à ses obligations contractuelles. Fait important, la saisie du duché comme du royaume est ici impossible, puisqu’on ne peut saisir que ce dont on est le propriétaire : c’est donc en violation flagrante du droit féodal que le roi de France Charles V, par une décision illégale, en 1375, profitant des maladresses du duc souverain Jean IV de Bretagne, et des circonstances politiques particulièrement difficiles pour le Duché, tenta de s’emparer de celui-ci et en prononça sa confiscation, croyant avoir consommé, par ce coup de force la « réunion » de la Bretagne à la France. On connait la suite : le Duc Jean IV, très impopulaire en Bretagne, chassé quelque temps auparavant par ses propres sujets à Londres, fut rappelé par les Bretons, dans un magnifique mouvement patriotique, pour défendre la patrie en danger d’être annexée par les ennemis maudits : les Français et leur roi : mieux valait un mauvais duc – qui ne fut d’ailleurs pas aussi mauvais qu’on l’avait cru, son gouvernement fut en réalité  -, que de tomber sous la coupe de l’ennemi millénaire … (23).

Toute allusion aux évènement de 2014, au cours desquels la France, d’une manière illégale, contraire au droit international, qui interdit péremptoirement de découper le territoire d’une nation incluse dans ses limites, n’est pas fortuite. Pas davantage le comportement insensé des prétendus « élus » qui, violant le droit et leurs promesses électorales solennelles, ont accepté le « découpage » de notre territoire national, qui nous appartient depuis douze siècles, cédant au pays d’en face 30 pour 100 de notre PIB, c’est à dire de notre richesse et de notre puissance. Ces faits, lorsque la Bretagne réapparaitre sur la scène internationale, appelleront des sanctions drastiques et une législation spécifique : ce sont des crimes politiques.

III – L’ENJEU POLITIQUE DE L’HOMMAGE POUR LE DUCHE DE BRETAGNE : les manipulations de la cour de France pour tenter d’empiéter sur les prérogatives souveraines de la Bretagne.

Les choses, présentées ici dans toute leur sécheresse juridique, comportent cependant unaspect politique majeur, qu’il est nécessaire d’expliciter clairement.

La cérémonie de l’hommage est un temps fort de la vie du Duché, non pas seulement à cause de ses implications juridiques (une alliance égale et symétrique), mais surtout de ses arrières pensées politiques.

On a souvent écrit que ce qui compte dans un traité international, ce n’est pas ce qui est écrit dans le texte, mais ce qui n’y est pas exprimé, c’est à dire les arrières pensées. C’est très souvent vrai. En tout cas, pour les traités entre la Bretagne et la France, lorsque Louis XI et François II se jurent une grande et parfaite amour (sic), c’est de haine qu’il s’agit, des deux côtés, en aucun cas d’amitié : chacun couperait la tête de l’autre s’il le pouvait ! Tout le reste est à l’avenant.

La Bretagne se dispenserait plus que volontiers de cette alliance obligée, qui comporte d’ailleurs un côté humiliant, jugé tel du côté breton, parce que les usages font que le puissant Duc de Bretagne, l’un des premiers princes par le prestige, l’étendue de ses Etats, l’importance de ses armées, ne peut s’y soustraire. Mais la disproportion des deux principautés – la France et la Bretagne – font qu’il n’est pas envisageable de tenter de s’en dispenser : une guerre immédiate en résulterait, tout comme, du temps de la guerre froide, les pays de l’Europe de l’Est se trouvaient dans le stricte nécessité de fait d’entrer dans l’alliance de l’URSS, à peine d’être envahies.

Après le bref interlude de l’Empire de Charlemagne, qui dure à peine plus d’un siècle, et qui n’a jamais réussi à conquérir la Bretagne armoricaine, et a même du lui céder – définitivement, en 851 -, deux comtés (Rennes et Nantes), et une vicomté (le pays de Retz), le Duc de France Hugues Capet est élu roi de la Francia occidentalis en 987. Ce royaume est de la pure théorie. Il existe dans les esprits, non dans les faits. Le premier Capétien et ses successeurs ne règnent que sur une sorte de « confetti » territorial, à peine plus vaste qu’un département actuel, cinq fois plus exigu que la Bretagne. Peu à peu, par une savante politique, le royaume capétien s’agrandit, par l’agglutination au minuscule territoire sur lequel le capétien exerce son autorité effective, de vastes principautés.  Vient un moment, les deux pouvoirs centraux de la Bretagne et de la France s’organisant et se « centralisant » peu à peu, le royaume de France, par son étendue et sa puissance, devient pour le Duché de Bretagne, un « voisin » plus qu’encombrant : un véritable danger pour son intégrité. Tous les moyens sont bons pour le roi de France pour « grignoter » peu à peu les prérogatives des princes territoriaux, ses voisins; dans ce domaine, ses conseillers font preuve d’une ingéniosité – d’une rapacité, ont écrit certains auteurs -, pour s’emparer de ce qui appartient à autrui (2).

Dans le cas des relations brito-françaises, les rois de France, toujours à l’affut des moyens leur permettant de s’agrandir aux dépens des principautés voisines – qui sont à cette époque de véritables Etats centralisés, totalement indépendants en fait de la France, même s’ils reconnaissent, au moins en théorie, la suprématie honorifique du roi de France.

Mais les Bretons résistent, avec une obstination – voire une fureur – invincible : les Français sont mis en échec, chaque fois qu’ils tentent d’empiéter sur les droits de la principauté de Bretagne.

Les prétentions des rois Capétiens sont insensées. Ils essaient de soutenir :

Que le duché fait partie du royaume de France ;

Qu’ils sont les souverains de la Bretagne ;

Que le duché a toujours fait partie du royaume de France ;

Que les Ducs leur doivent obéissance, et sont leurs sujets.

(Les prétentions des rois de France sont exposées, en particulier, dans des document précieux, reproduits en partie dans le tome III de l’histoire des institutions de la Bretagne, de Marcel Planiol, dans les notes 139 et suivantes, qui éclairent d’un jour lumineux les fondements des conflits franco-bretons).

 

C’est une imposture, répétée du treizième au quinzième siècle, par un pays expansionniste – et honteusement nationaliste jusqu’à une époque très récente -,  favorisée par un certain « flou » du droit de l’époque, l’imprécision du vocabulaire juridique, et surtout par la disproportion des forces dont disposent les parties, qui est telle, selon la loi universelle, que le plus fort tente d’écraser le plus faible, quels que soient les engagements solennels qu’ils ont juré de respecter. Jamais les Bretons, particulièrement jaloux de leurs droits, peuple fier et intransigeant, n’accepteront évidemment ces menaces larvées de sanctions militaire, ni ces tentatives grossières de manipulation du droit féodal, et ils le feront avec violence : les Français seront obligés de s’incliner, et ne parviendront jamais à leurs fins par ce moyen. Les Bretons – hélas – ne cèderont que lorsque, envahis en 1487, 1488, 1491, leurs armées sont détruites par les armées françaises. Et lorsque, par la force, la concussion, l’intimidation, et toutes sortes de manoeuvres répugnantes, la France parviendra à imposer sa dictature sur la Bretagne, de 1532 jusqu’à aujourd’hui, où, enfin, tout cela est démasqué, de même que les manoeuvres de leurs complices, que l’on désigne maintenant par leurs noms : les collabos et les traîtres. 

(Les « moyens » actuels utilisés par la France: agréer les moutons dociles en leur accordant l’investiture pour se présenter aux élections; organiser des simulacres d’élections; puis, renter les heureux élus, avec toutes sortes d’avantages « collatéraux »).

 CONCLUSION.

La matière sur le sujet est immense. La documentation est très abondante, mais n’avait jamais pu être vraiment décryptée d’une manière satisfaisante, ce qui explique les interprétations souvent fantaisistes qui en ont été données, en particulier par M. Georges Minois, pourtant docteur en histoire, et bien loin d’ignorer les sources historiques, car sur ce point, son savoir est immense (voir ci-après). Il nous a fallu des années pour y voir clair, complètement. Il serait inutile d’entrer dans le détail, qui est plus complexe que ce que nous écrivons ci-dessus.  Rédiger cette synthèse n’a pas été facile. Le grand Planiol, notre plus grand juriste breton, pris par le rédaction de son monumental ouvrage, y avait renoncé – en tout cas provisoirement, bien que le tome 3 de son Histoire des institutions contienne des observations et des références précieuses sur la matière. Détailler le sujet le rendrait incompréhensible, je l’ai donc simplifié volontairement, pour le rendre enfin accessible, sans rien sacrifier d’important, et en prenant un soin jaloux de n’écrire que des choses exactes : l’efficacité du présent travail suppose qu’il soit rigoureux, ce qu’il est.

L’idée forte qu’il faut retenir ici est que l’hommage prêté par le Duc pour la Bretagne, ne comporte en aucun cas une quelconque reconnaissance que la Bretagne est une partie du royaume de France, la reconnaissance d’une quelconque subordination. C’est précisément le contraire. 

L’hommage du Duc de Bretagne pour le Duché souverain de Bretagne, dont la signification est restée obscure jusqu’à aujourd’hui, comporte deux aspects :

Au plan juridique, il s’agit d’un simple contrat, dans lequel les deux parties sont à égalité. Elles se promettent d’une manière symétrique, par l’effet d’un contrat dit « synallagmatique », trois prestations : la fidélité, l’aide réciproque, principalement militaire, le conseil. Encore convient-il de souligner  que, dans les faits, il s’agit d’une  formalité sans guère d’effet, car, bien que l’hommage soit solennellement prêté, ni le roi de France, ni le Duc ne se sentent obligés en rien l’un à l’égard de l’autre : malgré ce « contrat », ils ne sont ni fidèles l’un à l’autre, ni pressés à s’aider dans les guerres – sauf de leur plein gré -, ni empressés à se conseiller mutuellement. Ceci est tellement vrai, que les deux pays sont en guerre assez fréquemment, malgré les baisers de paix hypocrites échangés par les deux ennemis irréductibles.

Au plan politique, l’hommage dissimule des arrières pensées non exprimées, mais claires : Les Français, d’une manière constante, essaient à chaque prestation d’hommage, de contraindre les Bretons à prêter un hommage lige, c’est à dire, selon eux, à les obliger, au moins implicitement, à reconnaitre que la Bretagne est une « concession » de la France, et que le véritable maître en Bretagne est le roi de France.  Les Bretons, férocement irrités par ces prétentions insensées, s’y refusent avec une obstination très ferme, et renvoient à chaque fois ces insolents dans leurs buts. Ne parvenant pas à les faire plier, les Français envahissent la pays en 1487, 1488, 1491. L’occupation du pays se prolonge encore en 2014.

L’hommage – ce point, capital, n’a jamais été souligné par personne – est un compromis entre deux pays souverains : du côté français, avec une mauvaise foi absolue, on essaie de se servir du droit féodal – en le manipulant -, pour tenter de contraindre, sous la menace à peine voilée, les Bretons à prêter l’hommage lige, c’est à dire à reconnaître implicitement la souveraineté de la France sur leur pays; du côté breton, ces prétentions sont littéralement invraisemblables; les Bretons connaissent leur histoire, les conflits incessants, les guerres qui les ont opposés aux Français. La fureur de la Cour de Bretagne, est plus que palpable dans les correspondances diplomatiques, les écrits politiques des historiens et des juristes qui entourent le Duc et son gouvernement. Le roi de France, nous l’avons dit, pour bénéficier de l’alliance bretonne, est obligé de céder, et de se « contenter » de l’hommage simple. Le Duc, humilié par ce simple hommage, qui lui est malgré tout imposé, cède aussi : il refuse l’hommage lige, mais accepte l’hommage simple.Ce point de convergence permet aux deux pays de coexister, non pas pacifiquement, mais en faisant semblant de taire leurs contentieux, ou de rechercher des solutions non militaires lorsqu’ils surgissent. L’invasion des hordes françaises, à partir de 1487, va tout détruire. Par bonheur, la recherche historique nous permet enfin d’y voir clair, c’est-à-dire de retrouver une partie de notre Dignité, en attendant le reste.

En réalité, comme aujourd’hui, la Bretagne et la France sont des ennemis héréditaires irréductibles, avec une détestation bilatérale spectaculaire au quinzième siècle, dont les textes apportent la preuve surabondante. Il en a toujours été ainsi : les Bretons et les Francs se haïssent depuis l’époque où ils se sont affrontés, au début du sixième siècle, dans les confins de Rennes et de Nantes. Par l’effet d’un lavage des cerveaux ininterrompu de 1789 au milieu du 20ème siècle, la France a réussi à empêcher les Bretons de penser librement, et a failli réussir à leur faire croire qu’ils sont Français. La redécouverte de leur histoire par les Bretons, et la sinistre amputation de la Bretagne par la France, en 1941, renouvelée en 2014, a créé un abcès de fixation, et fait renaître cette haine, dans une très large frange de l’opinion. Le mouvement ne peut que s’amplifier, car on ne pourra plus arrêter la vérité. Ce sera Justice. Et ce ne sont pas les Bretons qui l’ont cherché, mais nos voisins et leurs complices : la responsabilité n’est pas partagée, elle est exclusivement du côté de la France.

Cette remise d’aplomb du problème de l’hommage, montre une fois de plus ce que sont les relations de la Bretagne et de la France, du sixième siècle à aujourd’hui. Croire que les Bretons vont céder, parce que des pieds nickelés, en 2014, avec la complicité de lâches et de renégats, prétendent amputer la Bretagne de sa région la plus prestigieuse, est une illusion.

LOUIS MELENNEC, docteur en droit, diplômé d’études supérieures en droit public, en droit privé, en sciences criminelles, diplômé d’études approfondies en histoire, historien de la Bretagne.

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE PROVISOIRE.

Cette bibliographie sera complétée et mise en ordre ultérieurement.

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On ne peut comprendre la confusion qui a régné dans la littérature « hystoryque » donnée en pâture aux Bretons qui s’intéressent à l’histoire de leur pays, qu’en faisant appel à l’ignorance, à la paresse, et sans doute, chez certains, la perversité de vouloir inférioriser la Bretagne par rapport à la France. (On pense à Georges Minois, auteur pourtant érudit, qui a écrit des choses impensables sur la matière : voir ci-après). Il eût suffi, par exemple, de lire le monumental traité de Achille Luchaire, intitulé « Manuel des Institutions françaises, période capétienne », publié en …. 1892, et republiée, sans changement, à Genève en 1979, et de confronter cet ouvrage aux pages écrites par Arthur Lemoine de La Borderie, dans son histoire de Bretagne, à la fin du 19ème siècle, qui contient les relations détaillées des prestations d’hommages de plusieurs ducs. Tout se trouve déjà dans Luchaire : la définition du fief, la définition de l’hommage simple et de l’hommage lige, le caractère contractuel de la prestation d’hommage, surtout, l’absolue réciprocité des obligations des deux parties, c’est à dire le caractère synallagmatique du contrat, qui engage les deux parties (pour nous : le duc souverain de Bretagne et son ennemi le roi de France) d’une manière identique, et ne crée nullement un quelconque lien de subordination de l’un par rapport à l’autre. Surtout, le fait que dans ces liens entre deux seigneurs, quel que soit le contenu du droit – qui est assez clair, mais en même temps imprécis et susceptible de donner lieu à des interprétations « variées », selon les forces des deux protagonistes. L’un est plus fort que l’autre, le plus fort abuse de sa force, et ne respecte pas ses engagements, si solennels soient-ils.

Cette lacune des historiens bretons est impardonnable : il existe des milliers (nous disons : des milliers) d’actes écrits de prestations d ‘hommages, partout en France et en Bretagne. C ‘est toute l’histoire de la Bretagne et de la France : deux pays dressés l’un en face de l’autre, ennemis irréductibles, parfois alliés, mais jamais amis, de forces équilibrées jusqu’aux invasions de 1487-1491, la Bretagne étant réduite à presque rien après l’annexion honteuse de 1532, puis au rang d’esclave après la shoah de 1789 .

Rien n’a changé : en 2016, les Français sont toujours là, ils maîtrisent tout, ils fixent les programmes scolaires, interdisent l’enseignement de l’histoire nationale des Bretons – les misérables protestations des Bretons devant ce monstrueux abus de droit sont minables, par leur mollesse d’esclaves -, et nomment des gauleiters appelés préfets, sans que jamais un Breton soit nommé dans ces fonctions, ce qui est impensable.

Le rôle passif de ceux qu’on dénomme « les élus », est invraisemblable, et source d’une honte aujourd’hui très clairement perçue : la Bretagne est serve, c’est une colonie, maintenue dans ce lamentable état par ceux qu’on dénomme désormais les collabos.

 

Mélennec 14 ans ccc

 

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L’auteur rappelle qu’il ne pratique pas la méthode minable appliquée dans presque toute l’université de Bretagne, qui consiste à scotomiser le nom des auteurs qui ne partagent pas leurs idées. Au contraire, l’analyse de leurs erreurs – éventuelles – est bénéfique à la recherche de la vérité. On trouvera donc, ci-après les noms connus des historiens bretons, non sans que soient aussi soulignées la qualité de certains de leurs travaux. Il est temps que la Bretagne élimine de toutes ses démarches la jalousie et la mesquinerie, que nous ne connaissons que trop.

 

Bloch Marc, La société féodale, Paris 1968, éditions Albin Michel.

 Bouchart Alain, Grandes Chroniques de Bretaigne, publiées … et …Cet historien, conseiller d’Anne de Bretagne, encouragée par elle dans ses travaux, sacrifie aux usages du temps en accordant un crédit immodéré aux légendes et aux mythes bretons. Cependant, juriste de haut niveau, il est strictement honnête dans l’analyse des faits dont il a été le témoin, et dans l’analyse des archives. Son analyse des relations brito-française est précieuse.  …

 Boutruche R., Seigneurie et féodalité, Paris 1968 et 1970. Ouvrage majeur, indispensable.

 Cassard Jean-Christophe, L’histoire au renfort de la diplomatie : la « Généalogie des roys, ducs et princes de Bretagne », de Pierre Le Baud (1486). Article très important.

Contamine Philippe, Un aspect des relations entre la France et la Bretagne au 15ème siècle : Louis XI, François II et l’ordre de Saint-Michel (1469-1470), Questions d’histoire de Bretagne, Actes du 107ème congrès national des sociétés savantes, Brest, 1982, pages 207 à 227. Indispensable pour comprendre les relations très conflictuelles entre la France prédatrice et la Bretagne. En 1982, Philippe Contamine émet le voeu que le chapitre sur l’hommage des Ducs de Bretagne soit totalement réécrit, « très attentivement », en raison de son obscurité. C’est fait. Il reçoit par mail la présente étude, comme il a reçu le Livre bleu.

Ganshof F.L. Qu’est-ce que la féodalité ? Paris 1982, éditions Tallandier. Ouvrage majeur, qui contient tout ce qu’on doit savoir sur la question. L’ouvrage contient de très nombreux comptes-rendus de prestations d’hommages, en latin, avec une traduction.

Kerhervé Jean. Il ne semble pas que cet auteur ait publié d’étude sur l’hommage des ducs de Bretagne au roi de France. Mais il résulte très clairement d’un certain nombre de ses articles, qu’il pense, non pas que le Duc est souverain dans son Duché, mais qu’il a la prétention à l’être ! En d’autres termes, il aspire à devenir indépendant. Ce qui implique, à contrario, que Kerhervé considère que la Bretagne ….. fait partie du royaume de France. Erreur très grave, et qui a causé préjudice à tous ses élèves, et à l’approche qu’ils ont eu de leur propre pays, alors qu’il était encore libre. Le remarquable Planiol a publié dans le tome 3 de sa monumentale histoire des institutions de la Bretagne (pages 55 à 101) une étude irréfutable de la totale souveraineté de la Bretagne au moyen âge. J’ai refait les mêmes recherches, et suis parvenu aux mêmes conclusions, strictement; mais je ne les ai pas publiées, parce que le texte de Planiol est parfait, et que je ne peux rien apporter de plus.

Dans le Livre bleu de la Bretagne, j’écris ceci, à la page 43, qui résume mon point de vue :

« Nul autre que le Duc de Bretagne ne détient la moindre parcelle d’autorité ni de souveraineté dans le pays, qui est en tous points distinct des autres. En particulier, le roi de France n’y possède aucun gouverneur, aucun intendant, aucun lieutenant-général, aucun fonctionnaire, aucun soldat, aucune place forte, ni même aucun ambassadeur permanent. Le Duc, selon la maxime, est « roi dans sa Duché, tout comme le roi l’est dans son royaume »; il est Duc par la grâce de Dieu », et ne reconnait au temporel aucun instituteur, ni créateur, ni souverain, que Dieu lui-même ».

Je ne publie la présente note que parce que Kerhervé, alors que je lui ai adressé – par erreur – une de mes publications, a eu l’impudeur de me répondre une lettre d’une extrême grossièreté : « votre message encombre mon ordinateur … » Je n’attendais que cela. Ainsi, cet auteur écrit ses articles sans consulter les autres, là où précisément, n’étant pas juriste, encore moins spécialisé en droit médiéval, il devrait prêter la plus grande attention aux recherches de ceux qui ont acquis, dans ce domaine, une expérience – reconnue – d’un demi siècle. Outre l’incroyable mauvaise éducation, cela discrédite cet auteur, et jette une ombre importante sur les publications de l’école bretonne d’histoire, qui n’a pas besoin de cela. On lira avec attention la lettre-réponse à Jean Kherervé, qui a été publiée dans Facebook. Je précise que je n’attaque jamais – je dis : jamais -, par première intention, mais que si je suis injustement attaqué, on peut être assuré d’une réponse très ferme, très efficace, et très durable. Voyez, par exemple : Mélennec Wikipédia. Kerhervé est désormais un auteur du passé. Mais il est toujours temps d’apprendre. Cet auteur est cité ici parce que certains de ses travaux sont remarquables, et qu’on ne puisse pas penser que je suis de ceux qui écriraient qu’ils « encombrent mon ordinateur ».

La Borderie, Arthur Le moyne de, Histoire de Bretagne, tome 4 : pour Jean IV : page 11; 13 décembre 1366, Paris; pour Jean V : page 148; pour François Ier : page 344 (16 mars 1446); pour Pierre II : 365 et suivantes; pour Arthur III : 406 et suivantes; pour François II : 423 et 424; Tours 18 décembre 1461. Anne de Bretagne n’a pas été admise à prêter l’hommage, car son mari Charles VIII s’est emparé du Duché, comme s’il lui appartenait. Un auteur imbécile, breton de surcroit, a écrit : « … Mais elle lui a prêté le plus doux des hommages, en …. se mettant dans son lit, la nuit des noces ».

 Jeulin P., L’hommage de la Bretagne en droit et dans les faits, Annales de Bretagne, n° 41, 1934, pages 380 à 473. Exposé confus, sans ligne directrice, sans compréhension de l’enjeu  politique de l’hommage : un instrument – inefficace – entre les mains des juristes royaux pour tenter de réduire la Bretagne; un instrument – efficace -, entre les mains de la chancellerie bretonne, pour bouter les Français chez eux, et les y maintenir. L’auteur a fait ce qu’il a pu. Non juriste, il a fait beaucoup plus mal que les juristes d’Anne de Bretagne : Alain Bouchard, Le Baud …, eux, ont parfaitement compris ce qu’est l’hommage. Mais eux étaient juristes, ce que ne sont ni M.M. Minois, Croix et autres.

Le Baud Pierre, Histoire de Bretagne, avec les chroniques des maisons de vitré et de Laval, Paris, 1638

Le Marignier J. F., Le gouvernement royal aux premiers temps capétiens, Paris, 1965.

Lobineau, Histoire de Bretagne, tome I page 383 ;

Minois Georges, Du Guesclin, éditions Fayard, Paris, 1993. Cet auteur est cité à cause de ses erreurs, qui ont intoxiqué un certain nombre de lecteurs, qui ne sont ni historiens, ni juristes. Son livre est un condensé méthodique de la doxa française, que l’auteur, sans aucune connaissance du droit médiéval, présente comme vraie. Nous lui avions adressé une lettre manuscrite, il y a quelques années, pour lui indiquer quelques ouvrages, afin de s’informer sur ce que sont les relations féodo-vassaliques et l’hommage, notamment le remarquable ouvrage de Ganshof, sans doute le meilleur. Il n’y a pas eu de réponse, même de courtoisie. Il recevra à son adresse le présent article. Et peu importe ce qu’il en fera. En 2014, on ne peut plus laisser dire n’importe quoi sur l’histoire de la Bretagne, et permettre à la France, parce qu’elle dispose de la force et de l’argent pour orienter les votes à l’assemblée nationale, et de renter les votants (renter = servir des rentes), de continuer cette politique de spoliation monstrueuse, d’une Nation qui est maintenant largement au courant de son histoire, et qu’on ne trompera plus.

Voici quelques « perles » relevées dans la littérature de Georges MINOIS (notamment dans l’ouvrage qu’il consacre à DU GUESCLIN – très critiqué par les spécialistes du temps, dont madame Françoise AUTRAND, voir ce nom) :

– Le patriotisme breton n’existe pas : la patrie bretonne n’existe pas, le sentiment patriotique, en conséquence, ne peut exister : « Les clercs bretons bâtissent le sentiment national en écrivant leur histoire du Duché à leur manière, pour développer la fidélité à l’égard du Duc … Ils sont en grande partie les créateurs du « particularisme » breton … » (page 436).

– Le sentiment national breton n’existe pas. « C’est une invention des clercs, de l’entourage ducal, qui, à la fin du 14èmè siècle, et durant le 15ème siècle, cherchent à renforcer le prestige ducal en l’enracinant dans les anciens mythes, etc.  » (Minois, page 436).

– La Bretagne n’est ni un pays autonome, ni un pays indépendant : elle fait partie de la France. « Les nobles bretons qui refusent le rattachement du Duché à la Couronne, en 1379, défendent leurs droits et privilèges de nobles. Ce qu’ils craignent, c’est un pouvoir royal fort, qui va réduire leur autonomie, soumettre leurs terres à une fiscalité dévorante, rogner leurs droits de justice ». (Minois, page 441).  » On défend les droits et privilèges de la Bretagne, c’est à dire les droits et les privilèges de la noblesse bretonne, et même de la grande noblesse … » (sic !)

– La confiscation de la Bretagne par le roi de France en et l’invasion de la Bretagne … est conforme au droit. … car prise  « par une décision de justice conforme au droit féodal … (car) … le Duc Jean IV, allié des Anglais, s’est conduit en félon ».

Sauf que la décision de la justice est celle … d’une juridiction française – la cour des pairs, à la dévotion du roi de France -, et qui n’a jamais eu la moindre autorité en Bretagne. Comme si la Cour d’appel de Rennes décidait tout d’un coup que … l’Angleterre fait partie de la Bretagne ! Comme si l’invasion de la France par l’Allemagne nazie  était légitime, parce que décidée par le Chancelier allemand HITLER …

– Sur l’hommage et ses effets juridiques, cette invraisemblable absurdité :« Par le fait que depuis au moins quatre siècles, le comte puis le Duc de Bretagne, prête hommage au roi, la Bretagne fait partie du royaume (de France).

Comme si, le Duc prêtant également hommage au roi d’Angleterre pour ses seigneuries dans ce pays (en particulier le Comté de Richemond) …. la Bretagne faisait aussi partie du royaume d’Angleterre. Comme si le roi d’Angleterre, du temps qu’il possédait des seigneuries en France, l’Angleterre faisait partie de la France; comme si le Saint Empire Romain Germanique, par le fait que l’Empereur possède des fiefs en France, faisait aussi partie …

C’est EFFARANT. Tant d’ignorance sur les principes élémentaires du droit médiéval, sur ce que sont un Etat, une nation, un peuple, un sentiment national ou d’appartenance, le sentiment patriotique d’un peuple, l’indépendance, les pouvoirs souverains, la souveraineté  …. laissent pantois. On se pince pour savoir si on a bien lu, si des agrégés et des docteurs en histoire peuvent avoir écrit cela, et si l’on peut, dans l’université bretonne, accéder à ces hauts grades sans rien connaître de ces notions essentielles, alors qu’il existe une littérature IMMENSE SUR CES SUJETS.

Pour M. Minois, en particulier :

– La nation bretonne n’existe pas.

– Les Bretons sont un concept inventé : il n’y a aucune différence entre les Bretons et les Français; tout au plus une différence de « patois » dans la partie ouest de la péninsule, où on ne parle pas français ..

– Le sentiment national (c’est-à-dire le sentiment d’appartenance) n’existe pas. C’est une « fabrication », une « invention des clercs de l’entourage ducal », dans les années 1380-1480, dans le but de « développer la fidélité à l’égard du Duc, dans l’intérêt de celui-ci, et de la haute noblesse, exploiteurs par nature. Le patriotisme breton est « une fiction ». D’ailleurs, les clercs qui écrivent l’histoire  …. ne parlent pas breton !

– Les droits de la Bretagne n’existent pas; il s’agit, sous ce terme pompeux « des droits et privilèges de la noblesse bretonne, et même …. de la grande noblesse » (!). Comme en 2014, en somme : taisez vous, manants, vous n’avez droit à rien !

– Le seul moteur est l’avidité de la noblesse et du duc est le vil, le grossier intérêt matériel; la populace bretonne n’a pas voix au chapitre (la populace française de 2014 non plus, et pourtant, elle aime profondément son pays, et est consternée de ce qu’on lui impose !).

– L’hommage des Ducs étant rendu depuis des générations, ne peut avoir qu’une signification : une reconnaissance par le Duc que « La Bretagne fait partie du royaume, et que les Bretons sont vils sujets du roi de France.

– La confiscation du Duché par Charles V en   est justifiée, ainsi que l’invasion militaire  :« c’est la moindre des choses » écrit le bon docteur Minois (page 432). Le Duc Jean IV ayant manqué à ses obligations, il était normal qu’on le punisse. M. Minois ignore qu’on ne peut saisir ce qui ne vous appartient pas ! Or, la Bretagne est bretonne, et non française. Elle n’est pas un fief, elle n’est pas née du démembrement de l’Empire de Charlemagne, encore moins du royaume de France.

Tout cela est consternant, vertigineux. M. Minois, Alain Croix et d’autres ne savent pas ce qu’est une nation, un sentiment national, le droit international, un contrat, un traité, la souveraineté, un fief, un bénéfice … Toutes notions complexes, il est vrai, qui relèvent de disciplines qui ne sont pas l’histoire … Quand au droit médiéval, qui a donné lieu à tant de publications – une bonne dizaine d’ouvrages au moins – .. L’hommage ? La saisie du Duché ? .. A quoi bon ?

Lorsque nous parlons de la falsification de l’histoire de la Bretagne, celle-ci, hélas, résulte aussi de l’ignorance.

Mélennec Louis, plusieurs articles dans les blogs (taper dans Google : Mélennec hommage).

Morice, Preuves, I, 1608 à 1612 ; Preuves II, 376-378 ; Histoire page 320. … Pierre II,

Olivier-Martin F. R.

Planiol Marcel, Histoire des institutions de la Bretagne, Mayenne, 1984, 5 tomes. L’ouvrage est irremplaçable. Planiol démontre d’une manière très détaillée et irréfutable la totale souveraineté de la Bretagne, les empiètements incessants de la France, et comment, dans tous les cas, ils sont repoussés par les Bretons. (tome 3, pages 51 à 104). Dans le tome 5, il traite dans des chapitres lumineux de l’annexion (pages 5 à 21), et des privilèges politiques de la Bretagne (pages 23 à 42). Sans les écrits de Planiol, on serait encore dans l’obscurité pendant longtemps, peut-être d’une manière définitive. Je dois personnellement beaucoup à cet auteur. Et le reconnais très volontiers. A ma connaissance, aucun historien breton ne se sert de cet ouvrage monumental pour ses recherches. Il est vrai que Planiol est d’un niveau supérieur, dont les ouvrages de droit sont encore édités. Sur la question de l’hommage : tome III, pages 53 et suivantes, et page 71.

Saint-André Guillaume de, in Morice, Preuves, II.327-328. Traduction du texte en français moderne : « La vérité enseigne que le Duc ne tient pas la Bretagne du roi de France, et soyez certain qu’au roi de France, le Duc ne doit point d’obéissance ».

 

Wikipédia, l’encyclopédie de toutes les erreurs. Aller à la rubrique « Hommage ». Citée ici pour donner aux lecteurs l’occasion de rire des inepties prétentieuses qu’on peut lire dans les publications de cette officine, surtout sur la Bretagne. Ces « articles » sont supervisés par des « experts » d’un type spécial : ils ne connaissent rien des sujets qu’ils sont censés relire ! De plus, nous les avons surpris en flagrant délit de mensonges et de mauvaise foi.

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 (1) Sur le caractère synallagmatique du contrat conclu entre les deux hommes, voir, notamment : Philippe de Beaumanoir, page …; Fulbert de Chartres ….; Ganshof, page …; Philippe Némo, tome I, page …807; ..

(2) Cela peut paraitre surprenant aujourd’hui. Il faut savoir que tout est bon pour le royaume de France pour chercher des prétextes contre la Bretagne, pour tenter d’y prendre pied. Ainsi, lorsque Louis XI propose au Duc de Bretagne d’entrer dans l’ordre de Saint Michel, qu’il vient de créer, en … et que le Duc refuse, notamment parce qu’il est un trop haut personnage pour côtoyer quelques simples chevaliers qu’on y trouve, Louis XI, qui feint d’être offensé, masse des armées aux frontières de la Bretagne pour la menacer ! Voir sur ce point l’article sus-cité de Philippe Contamine.

 

(A suivre).

 

 


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